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AVERTISSEMENT sur les pièces suivantes
J’ai cru qu’on ne serait pas fâché de trouver ici quelques morceaux des plus belles pièces d’Éloquence, des Anciens et des Modernes, pour avoir le plaisir d’en faire la comparaison. Il est vrai que je ne donne pas ici des traductions faites mot pour mot, mais j’aurais cru ne pas agir de bonne foi, si j’avais pris ce parti-là, puisqu’il n’y a point d’ouvrage d’Éloquence qu’une traduction purement littérale, ne rendît ridicule 1 Le débat est récurrent dans Le Parallèle ; voir le début du dialogue qui vient de s’achever et le t. III où le sujet est repris. Sur les enjeux de la traduction à l’époque, nous renvoyons à l’ouvrage de R. Zuber, Les Belles Infidèles et la formation du goût classique, Paris, Albin Michel, 1995. Les principes de création poétique mis au jour par les partisans de la traduction libre, élégante et claire, ont contribué à forger le goût de l’époque. Anne Dacier, chez les Anciens, réagira à cette pratique et proposera des traductions qui se voudront plus fidèles. [DR] . La traduction de l’ Oraison Funèbre de Périclès rapportée par Thucydide est de Monsieur Perrot d'Ablancourt 2 Il est le représentant le plus éminent de la traduction libre de maints auteurs antiques dont Lucien, Tacite, César. En 1662, il fait paraître chez A. Courbé à Paris la traduction de l’Histoire de Thucydide, de la guerre du Péloponèse, continuée par Xénophon Sur cet auteur, voir R. Zuber, Les Belles Infidèles et la formation du goût classique, Paris, Albin Michel, 1995. [DR] , celle du Panégyrique de Trajan est de Monsieur l’Abbé Esprit 3 Parue en 1677, à Paris chez P. Le Petit, la traduction serait due à Jacques Esprit selon Roman d’Amat, et non à son frère cadet, l’abbé Antoine Esprit auquel il fut d’abord attribué. [DR] ; je ne ferai point d’excuse 4 « Je ne chercherai pas à justifier ou légitimer ces deux traductions ». [DR] sur ces deux traductions, le mérite de leurs Auteurs est trop connu. Pour les autres quoiqu’elles ne soient pas d’une aussi bonne main, elles ne sont pas moins fidèles ni moins exactes, j’y ai mis toute la beauté de Style, tout le nombre et toute l’harmo304 nie que je suis capable de leur donner.
Je ne crois pas qu’on se plaigne du choix que j’ai fait des Auteurs. C’est Périclès qu’on nommait le Tonnant et de la bouche duquel on croyait voir sortir, quand il haranguait, des foudres et des éclairs 5 Annotation en cours. ; il est vrai que cette oraison ne nous vient pas de lui immédiatement, et qu’elle nous est donnée par Thucydide, mais qui oserait dire que Thucydide y ait rien gâté ? Le second est Isocrate, cet orateur qu’on dit avoir connu tous les secrets de l’Éloquence, et qui n’employait pas moins que dix années à la composition d’un Panégyrique 6 Annotation en cours. . Et le troisième enfin est Lysias, dont Cicéron dit que c’était un Orateur extrêmement subtil et élégant, et qui approchait fort de la perfection 7 Annotation en cours. . À l’égard des trois Modernes, que je leur oppose, qui sont Monsieur l’Évêque de Meaux, Monsieur l’Évêque de Nîmes et le Père Bourdaloue, la voix publique me les a nommés 8 Annotation en cours. .
On m’aurait blâmé si j’avais oublié le Panégyrique de Trajan : et on ne 305 doit pas trouver à redire que je lui aie opposé une Lettre de Voiture, quoique ces deux Ouvrages soient d’une nature bien différente 9 Annotation en cours. , puisqu’en cela tout le désavantage est du côté du Moderne ; comme on a comparé plusieurs fois ces deux auteurs ensemble, on sera bien aise de comparer ici leurs ouvrages. J’ai aussi opposé à une lettre du même Pline, une lettre de Balzac, parce qu’elles contiennent toutes deux la description de leur maison I Variante 1693 : de leurs maisons [DR] des Champs, et qu’il en est fait mention dans l’ Apologie de Balzac , où il est dit plaisamment que celle de Balzac est la description d’une maison de plaisance faite par un Orateur, et celle de Pline, la déclaration d’une Maison à vendre faite par un Architecte 10 Annotation en cours. . J’ai enfin rapporté une lettre de Cicéron qu’on ne peut pas trouver mauvais que j’aie choisie, puisque dans une de celles qu’il adresse à Atticus, il lui en parle en ces termes. Faites-306 vous donner par Lucceius : la Lettre où je le prie d’écrire mon Histoire. Elle est très belle [ a ] 11 Annotation en cours. . J’oppose à cette Lettre la première qu’on trouve dans le recueil de celles de Balzac, adressée au Cardinal de Richelieu. Voilà les raisons de mon choix, mais chacun peut à sa fantaisie choisir d’autres ouvrages des Anciens et des Modernes, pour en faire la comparaison.
a. Epistolam, Luccejo nunc quam misi, qua res meas ut scribat, rogo fac ut ab eo sumas ; valde bella est. Ad Atticum , l. IV. Epist. VII.
a. Epistolam, Luccejo nunc quam misi, qua res meas ut scribat, rogo fac ut ab eo sumas ; valde bella est. Ad Atticum , l. IV. Epist. VII.